Extrait :
Extrait de la préface :
Le Requiem est un livre unique : Akhmatova, l'un des plus grands poètes russes du XXe siècle, a composé ces poèmes en Union soviétique, au plus fort de la Terreur stalinienne, sans même oser les confier au papier. Son premier mari avait été fusillé, son fils était arrêté, et plusieurs de ses amis proches allaient périr dans les camps. Pas une famille autour d'elle qui n'eût été touchée par les répressions.
Ces poèmes parlent de ce qu'elle vivait alors : l'attente devant les prisons pour porter des colis, la douleur d'une mère à qui l'on a pris son fils, et cette angoisse, cette peur humiliante qui ont pesé pendant plus d'un demi-siècle sur un pays entier.
Les mots sont simples et nus, la langue est sobre, parfois laconique, les sensations ténues trahissent des émotions profondes, et la voix est si limpide qu'elle semble s'effacer pour devenir celle de tout un peuple : Akhmatova est ici la dépositaire d'une souffrance qui la dépasse, emportée par le flux ample et majestueux de ce Requiem dédié à toutes les victimes du régime communiste.
Le poète Iossif Brodski, qui deviendra son ami à la fin de sa vie et dont elle admirait le talent, lui rendra plus tard hommage depuis son exil aux Etats-Unis :
Par-delà l'océan, sois saluée, grande âme,
Pour avoir eu ces mots, et salut à tes cendres
Dormant en terre natale, là où par ton bienfait
Fut doté de parole un monde sourd-muet.
Présentation de l'éditeur :
L'or se couvre de rouille, l'acier tombe en poussière, Et le marbre s'effrite. Tout est prêt pour la mort. Ce qui résiste le mieux sur terre, c'est la tristesse, Et ce qui restera, c'est la Parole souveraine. Anna Akhmatova. En Russie, à la fin des années trente, parmi les millions d'innocents arrêtés qui disparaissent dans les cachots et dans les camps, il y a le fils d'Anna Akhmatova, un des grands poètes russes du siècle. Elle compose alors des poèmes qu'elle n'ose même pas confier au papier : des amis sûrs les apprennent par coeur et, pendant des années, se les récitent régulièrement pour ne pas les oublier. En évoquant sa tragédie personnelle, Akhmatova parle au nom de toutes les victimes, et aussi de toutes les femmes qui, comme elle, ont fait la queue pendant des semaines et des mois devant les prisons. Ses vers " formés des pauvres mots recueillis sur leurs lèvres ", comptent parmi les plus poignants de la littérature russe. Les dizaines de millions de voix étouffées et brisées qui, grâce à elle, traversent l'espace et le temps pour parvenir jusqu'à nous, résonneront encore longtemps dans la mémoire de la Russie.
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