Extrait :
INFLUENCE DE L'IMAGE SUR LA PENSÉE
Un vieil adage nous apprend que : «Une image vaut mille mots.» Et c'est vrai dans une large mesure. Tout objet que nous regardons éveille immédiatement une réaction dans notre esprit. Si nous avons devant les yeux l'image d'un crayon tout ordinaire, il se forme en nous une association d'idées ; et cependant, si vous essayez de décrire ce que vous voyez vous éprouvez quelque difficulté à le faire ; les impressions que vous percevez sont complexes, formées de plusieurs éléments qui, par l'image, sont synthétisés simultanément ou bien en une succession si rapide que vous ne vous rendez pas compte de leur pluralité originelle.
Si vous commencez à décrire le crayon, vous êtes obligé de partir d'un premier point. Duquel de ses aspects parlerez-vous en premier lieu ? Décrirez-vous sa longueur, ses dimensions ? Comparerez-vous sa couleur à celle d'un autre objet ? Serait-il préférable de parler de son usage ? Si vous désirez qu'une autre personne puisse mentalement voir ce crayon, ou en avoir la même idée que vous, un certain nombre de facteurs interviennent pour que vous parveniez à en donner en quelques mots une description exacte. Une analyse est tout d'abord nécessaire. Que voyez-vous ? Quels mots peuvent représenter votre idée ? L'ordre dans lequel est faite la description doit être tel que l'image mentale ne présente pas de solution de continuité. Les idées doivent composer, dans l'esprit de votre auditeur, un seul objet cohérent et non plusieurs qualités ou objets séparés. Par conséquent, à moins que vous ne soyez très habile et très doué, que votre esprit soit extrêmement clair, une multitude de mots pourrait être nécessaire pour décrire le crayon, dont vous avez une impression si immédiate et si exacte par l'image.
Il y a donc, psychologiquement et normalement, une excellente raison à ce que nous préférions voir l'image d'un objet, d'une scène, d'un paysage, d'un événement, plutôt que d'en lire une description écrite ; des images, nous tirons plus facilement des idées ; mais c'est en cela que résident certains dangers. D'où vient l'idée qui fait impression sur nous lorsque nous regardons une image ? Nous construisons les nôtres, basées uniquement sur notre propre perception, sur nos propres expériences, selon notre angle d'observation. Voyons-nous ce qu'un autre observateur, doué d'un sens de l'analyse plus aigu que le nôtre, pourrait percevoir ? Il est reconnu que deux personnes ne voient pas une même chose de la même façon ; deux témoins d'un accident ne le relateront pas dans les mêmes termes ; ils pourront en donner une idée différente. Celui qui n'a que des connaissances limitées, que peu d'expérience et n'a pas été habitué à raisonner, offrira d'une image une compréhension limitée également, et il est possible que cette image contienne un élément important qu'il n'aura pas su percevoir, n'étant pas habitué à observer. Combien de fois n'avons-nous pas répondu par cette phrase : «Je n'y avais pas pensé», lorsqu'une autre personne nous a expliqué une chose d'une façon complète et approfondie ? Par conséquent, jusqu'à quel point laissons-nous dans l'ombre ce que nous devrions voir lorsque nous apprenons par l'image ?
Les informations fournies dans la section « A propos du livre » peuvent faire référence à une autre édition de ce titre.