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Le monde selon Cheng: Un conte contemporain - Couverture souple

 
9782916355894: Le monde selon Cheng: Un conte contemporain
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Extrait :
Un mensonge peut tromper quelqu'un mais il vous dit la vérité : vous êtes faible.
Tom Wolfe

Chapitre 1
LE GRAND VOYAGE

Nous vivons comme des brutes, disait mon père. Depuis que le monde a changé, nous vivons comme des brutes et plus rien n'a de valeur. Quand il parlait ainsi, il prenait un air grave, mais la plupart du temps, c'était un homme joyeux, surtout avec moi. Je m'appelle Cheng l'Asperge, je suis haut comme trois pommes, je sais à peine lire, je sais compter. Je suis né au royaume de Camelote mais j'ai vécu ailleurs. Mon père est ficeleur d'asperges, comme ma mère et mes soeurs. Jusqu'à mon départ, je passais mes journées sur la zone de conditionnement, entre le port et l'aéroport, entre ciel et mer. Avec mon père, ma mère et mes soeurs. Le matin, nous nous levions tôt, nous buvions du soda en regardant des jeux sur le poste de télévision, et nous partions tous ensemble attendre le camion. Il faisait encore nuit. D'abord, nous entendions le moteur, les grincements des suspensions qui ressemblaient à des souffles d'épuisement, ces bruits nous parvenaient par vagues successives, puis nous apercevions les rais des phares qui partaient dans tous les sens parce qu'il y avait des trous énormes dans la route, et enfin nous sentions l'odeur d'huile chaude de la machine. J'aimais m'asseoir à côté de mon père sur le plateau du camion. Mes soeurs dormaient contre ma mère, qui dormait aussi. Pas mon père. Ni moi. Mes soeurs et moi faisions partie des enfants qui n'allaient pas à l'école. Il y avait de plus en plus d'enfants qui n'allaient plus à l'école depuis qu'elle n'était plus obligatoire dans notre région. Mon père m'apprenait à compter. À trois ans, je savais compter jusqu'à cent mille. À quatre ans, j'ai compris l'infini. L'infini, c'est quand on ne peut plus compter. Cela donne le vertige et cela fait peur aussi.
Avec mon père, j'ai appris à compter le nombre de fois où le camion s'arrêtait. À chaque pause, d'autres familles montaient. Cela sentait mauvais à cause de la fumée d'échappement qui remontait à l'arrière, piquait les yeux et la gorge et faisait tousser. Je connaissais chacun des passagers par son nom. Trente-sept arrêts au village, dont un devant le magasin où mon père nous achetait le soda de la journée, le blanc à bulles dans une bouteille en plastique mou qui tient à peine debout toute seule quand elle est vide, trois autres arrêts à la sortie du village, à côté de l'usine de sacs d'aspirateurs aux odeurs de carton recyclé, et puis onze autres encore. Je comptais les départs, et en même temps, les passagers qui montaient. À la fin, nous étions entre cent trente-huit et cent quarante-trois.
(...)
Un mot de l'auteur :
Avec "Le monde selon Cheng", j'ai souhaité donner une traduction romanesque à une tragédie économique, celle de la civilisation du low cost. Depuis quelques années, le monde de l'économie court après une légende, celle du bas coût, qui est censée offrir les mêmes biens, les mêmes produits, les mêmes services, à des prix toujours plus bas. Cette pierre philosophale de l'économie moderne est malheureusement une vaste escroquerie. Cette théorie consiste dans la plupart des cas à remplacer le bien ou le service existant par un bien ou un service de moindre qualité, logiquement produit à moindre frais ; elle ne fait qu'accélérer le phénomène de surconsommation. Mais le low cost est une affaire rentable. Il touche maintenant la plupart des secteurs, de l'alimentation aux transports, en passant par la médecine et l'éducation. "Le monde selon Cheng" est un conte tragique, il prend la forme d'une errance, celle d'un jeune presque analphabète, dans un monde dominé par la perte de la valeur. Parachuté par hasard dans un univers ou la qualité n'a plus droit de cité, Cheng découvre à ses dépens les coulisses de la sous-civilisation. Toutefois, puisque rien n'est encore définitivement perdu, j'ai voulu injecter un peu d'humour et de fantaisie. Et quelques références à mes auteurs adorés : London, Murakami...
Sans la confiance et les conseils avisés de mon éditeur Armand de Saint-Sauveur, ce conte moderne n'aurait pas vu le jour. Je dois aussi beaucoup à mon confrère Bruno Fay avec qui j'avais réalisé une longue enquête journalistique sur le sujet, et aux nombreuses personnes qui m'ont éclairé sur ce thème. Je partage avec tous le plaisir de voir "Le monde selon Cheng" publié.

Bonne lecture,

Stéphane Reynaud

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  • ÉditeurEditions Intervalles
  • Date d'édition2013
  • ISBN 10 2916355898
  • ISBN 13 9782916355894
  • ReliureBroché
  • Numéro d'édition1
  • Nombre de pages91

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Reynaud, Stéphane
Edité par INTERVALLES (2013)
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ISBN 10 : 2916355898 ISBN 13 : 9782916355894
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