Extrait :
Extrait de l'introduction :
Il est d'usage de considérer, en science politique, que l'existence de la domination au sein d'une société ou d'une relation humaine ne suffit pas pour qu'il y ait «politique» au sens propre du terme. Il est aisé de prendre deux exemples simples pour s'en convaincre. Ce n'est, bien sûr, pas systématique, mais il est néanmoins courant au sein d'un couple, qu'un des membres domine l'autre. Force est pourtant de constater que cette forme de relation de pouvoir ne relève pas de «la politique» ! De même, dans les groupes sociaux primitifs, essentiellement organisés autour de la famille, la domination du patriarche est très courante. Celle-ci n'est pas non plus, à proprement parler, politique. Elle ne le devient qu'à partir du moment où le pouvoir sur des hommes et un territoire (un patrimoine) nécessitera l'exercice d'une autorité sur des personnes qui ne sont pas directement membres de la famille du patriarche, ou, à la rigueur, qui en sont très éloignés, voire seulement reconnus comme tels symboliquement. Ceci nous amène à rappeler que la politique naît à partir du moment où s'opère une rupture, au sein de la société, entre deux groupes, celui des gouvernés, qu'on nomme volontiers la société civile et le groupe des gouvernants, qu'on intitule la sphère politique, ou plus souvent, «les élites».
Au fur et à mesure de l'évolution historique, notamment au cours du XIXe et du XXe siècle se sont, heureusement, développées et ancrées des formes démocratiques dans l'Europe occidentale. Ce phénomène n'a été possible que grâce au recours, à la mobilisation d'élites sociales. Elles ont vu dans cette opportunité, une chance de faire triompher un certain nombre de valeurs auxquelles elles croyaient, et en même temps, l'expression de leurs intérêts de classe. Ainsi, dans le dernier quart du XIXe siècle, alors qu'il n'existait pas de parus politiques en France, l'enjeu majeur qui opposait la droite et la gauche était la forme souhaitable du régime : monarchie pour la droite, république pour la gauche. Au lendemain du second empire, vaincue par la Prusse à Sedan, la France est en face d'une période de mutation et d'incertitude. Elle est en proie aussi au mouvement social qui s'exprime brutalement avec la Commune. Tout bouge, les mentalités sociales, l'économie ! La politique, cette «grande prêtresse» de la stabilité destinée à éviter la violence sociale généralisée, va devoir s'adapter brutalement sous peine de faillir. Ainsi, entre 1870 et 1877, les gouvernants successifs se trouvent pris en tenailles entre la nécessité de parer au désordre social immédiat (Thiers et les «versaillais» réprimeront sans pitié les communards) et le besoin de laisser «du temps au temps» car, si l'assemblée élue au lendemain de la guerre de 1870 est majoritairement monarchiste, elle révèle plus une réaction de la population face à la peur du désordre social que l'évolution profonde d'une société pacifiée. Entre la nécessité de parer au plus pressé et l'urgence d'élaborer des solutions stables sur le long terme, entre l'évolution du quotidien des gens, des cadres économiques, et l'inertie relative des mentalités, la politique bricole, pare au plus pressé et se donne du temps pour s'adapter. Ainsi, la république proclamée au lendemain de Sedan est une solution provisoire, un «syndic de gestion». Et si les étapes qui se poursuivent jusqu'en 1877 sont souvent lues comme une stratégie irrésistible, force est de constater qu'il y a là l'effet malencontreux de l'illusion rétrospective. Certes, en 1873, un président est élu par les chambres, mais pour un septennat destiné à préserver les chances d'une restauration ; certes en 1875, un cadre juridique est donné au régime, mais sous forme de «lois constitutionnelles» et non de constitution.
Présentation de l'éditeur :
Pourquoi s'intéresser aux conseillers généraux ?
Parce qu'en mars 2008 aura lieu un scrutin cantonal. Parce que depuis 2003, le conseil général est le principal acteur des politiques sociales locales, compétence qui concerne tous les citoyens dans le quotidien de leur vie.
Parce qu'en 2004, alors qu'habituellement les conseils généraux étaient des bastions de la droite, la gauche a conquis plus de la moitié des présidences départementales. C'est un tournant de la démocratie locale. 2008 confirmera-t-elle cette tendance ?
Parce que, certes timidement, mais inexorablement, les femmes entrent dans cette arène politique et contribuent à façonner son évolution, son adaptation. Cette tendance sera accrue en 2008 avec l'évolution de la législation électorale de janvier 2007 (obligation de présenter un suppléant paritaire).
Parce qu'au-delà du stéréotype du conseiller général, âgé, systématiquement réélu, la sociologie de ces élus est marquée par un turn over important : 40 % d'entre eux sont dans un premier mandat.
Parce que l'image d'élus qui mettent de coté leurs opinions politiques pour s'entendre entre eux a fait long feu : aujourd'hui les conseils généraux sont des assemblées politiquement structurées comme les autres avec une majorité et une opposition.
Parce qu'enfin, tous les éléments sociologiques, juridiques et politiques se combinent pour infirmer une idée reçue : la probable disparition de ce niveau de démocratie locale.
Jean-Philippe ROY, né en 1963, est maître de conférences de science politique et chercheur au Laboratoire d'études sur les réformes administratives et la décentralisation (LERAD) à l'Université de Tours. Il enseigne également à l'école de journalisme de l'IUT de Tours. Il est membre élu de la quatrième section du Conseil national des universités et, depuis quatre ans, conseiller scientifique de l'Union des conseillers généraux de France. Il intervient couramment dans les médias quand l'actualité concerne ses domaines d'expertise.
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