La guerre civile est d�clar�e - Couverture souple

Paviot, Christophe

9782918135760: La guerre civile est d�clar�e

Couverture souple

ISBN 10 : 2918135763 ISBN 13 : 9782918135760

Editeur : Dialogues.fr, 2013

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Extrait :

Le mec l'aborde brutalement, hey mec. Il va lui proposer l'embrouille ou un truc illicite. Rue d�serte, la nuit. Alors lui, il approche son front au bord de la casquette de l'autre, les yeux cal�s dans les siens. Ouais ? Dis, �a t'int�resse une machine � caf� ? Je bois pas de caf�. Ah ok, salut, bonne soir�e. Bonne soir�e a toi aussi. Faire peur � celui qui veut faire peur, �a c'est son truc. Il se d�place toujours avec un livre �pais de Shakespeare � la main, histoire de d�foncer la gueule du premier agresseur. Le truc est tr�s ab�m�, mais il n'a jamais ab�m� personne avec �a, il a vingt-huit ans et il ne s'est jamais vraiment battu. Les livres, il les lit rarement, il r�sume leur utilit� � celle d'une arme. Et puis, le peu qu'il en connaisse, il trouve que les �crivains la ram�nent trop en g�n�ral, ces types ont zapp� que les gens ne lisent que pour s'endormir. Voil� ce qu'il en dit.
Ses parents l'ont baptis� Anthony mais il pr�f�re se faire appeler Arnaud, son second pr�nom. Un h�ritage du c�t� de son oncle, son parrain, celui qui bosse chez Citro�n � l'usine de la Janais. Un homme soud� une vie enti�re aux lignes de montage, � encastrer des �l�ments de plastique et de m�tal, sous la vigilance de la productivit�.
Il a quelqu'un, elle s'appelle Estelle. Il a quitt� quelqu'un d'autre pour elle. Une St�phanie qui t�l�chargeait des films toute la journ�e en faisant cramer des bougies � la cannelle. Il se souvient tr�s bien de ce qu'il pensait de leur relation apr�s deux mois seulement pass�s ensemble, il se disait qu'ils �taient parfaits l'un pour l'autre, parfaitement incompatibles. Elle n'avait pas dur� longtemps la p�riode o� ils avaient �t� si bien, l'un contre l'autre, � s'effleurer du bout des sentiments. Cette histoire avait quand m�me tenu deux ans trois quarts, il n'avait pas su comment la quitter. Il s'�tait m�me pos� la question du suicide, �a lui paraissait plus facile que de la laisser. Il ne voulait pas la blesser, cette St�phanie aurait pu se couper un bras pour lui. A l'�poque, il avait m�me song� � s'engager dans l'arm�e pour partir � la guerre. La l�chet� fait faire de sacr�es conneries quand m�me. Ses parents auraient pu perdre leur fils en Afghanistan � cause d'une fille fragile. Mais il n'est jamais parti courir dans le d�sert comme une charogne en guerre, il savait qu'une fois l�-bas, ce n'�tait pas si simple de se faire percer la peau. Il aurait pourtant bien aim� que d'autres choisissent � sa place, si possible des ennemis, qu'on le ram�ne dans un rectangle sous un drapeau. Mais non, il ne s'est pas engag�, ni dans l'arm�e ni avec St�phanie. Il l'a largu�e un soir au jardin du Thabor, devant la voli�re des ins�parables. Il l'a revue une seule fois depuis, un samedi, � la tomb�e du jour, il faisait de l'essence au Centre Aima, � la pompe de chez Carrefour. Les diodes lumineuses du tableau indiquaient qu'il avait d�j� enfil� vingt bons litres dans son r�servoir, quand la bagnole de St�phanie �tait venue se coller au tuyau d'en face. Il l'avait regard�e, compl�tement d�bo�t�, incapable d'articuler un truc gentil, rien, m�me pas une saloperie. Il �tait remont� dans sa caisse, une sous-marque de Renault d�localis�e en Roumanie. Il n'avait pas allum� la radio, songeant plut�t � ce qu'avait �t� la vie avec elle, songeant � ce qu'aurait �t� la vie avec elle. Il s'�tait �vapor� dans la nuit, la ville de Rennes lui semblait assez grande pour vivre aux c�t�s de ses ennemis ou pour coexister � un quart d'heure de route d'un coeur massacr�.

Pr�sentation de l'�diteur :

Cet homme a peur. Non pas de l'inconnu, mais de ce qu'il conna�t trop bien : la tyrannie du lieu de travail, les l�chet�s diverses de ses cong�n�res, la ruine programm�e de l'humanit�. Pourtant, il est bien ins�r� dans la soci�t�. Mais en apparence seulement. Car Arnaud suffoque. Il cr�ve de cette incandescence qui br�le ses forces : la peur. La peur qu'il veut faire basculer dans le camp adverse. Autonome. Grain de sable. D�cid� � affronter, seul, les forces, les r�gles et les rouages de notre soci�t�. Ni ses parents, ni sa copine Estelle, ni ses relations ne peuvent soup�onner sa d�termination. � Rennes, cadre urbain de ce roman de la rupture, Arnaud, depuis longtemps, travaille � son invisibilit�. � son effacement. Aucune asp�rit�, aucun caract�re distinctif. Camouflage maximum. �Je sais d�j� que je vais tromper la vigilance des autorit�s. Elles pourront bien me traquer. Je suis invisible.�
La grenade est arm�e, la goupille est chaude dans sa main, le d�compte est entam�.

L'auteur Christophe Paviot est n� en 1967 pr�s de Rennes. Il a d�j� connu plusieurs vies : il a failli devenir pompier comme son p�re, a travaill� comme docker dans le port de Valparaiso, puis dans une ferme de crocodiles en Australie. Il est aujourd'hui directeur artistique dans une grande agence de publicit� parisienne.

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