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Extrait :
A nulle autre pareille...
Vous n'avez pas idée de ce qu'il y a dans un seul son !
Il y a même des contrepoints si on veut, des décalages de timbres différents.
Il y a même des harmoniques qui donnent des effets tout à fait différents qui ne sortent pas seulement du son mais qui entrent au centre du son.
Giacinto Scelsi
S'il me fallait de quelques mots définir la musique d'Éliane Radigue, je dirais qu'elle est radicale, inclassable et à nulle autre pareille. J'ajouterais qu'il faudrait, pour la décrire, emprunter au vocabulaire des peintres, parler de drapés, évoquer ces toiles de Rothko dont on découvre, lorsqu'on les regarde de près, qu'elles sont riches de milles couches superposées de couleurs et de lumière. Il faudrait parler de ces sons qui flottent lentement, qui évoluent imperceptiblement, si discrètement que l'auditeur saisit à peine le moment où il se passe quelque chose de nouveau et ne sait plus, à la fin, très bien la distinguer du silence dans lequel elle s'éteint.
Musique de la lenteur, de l'infime vibration d'ondes qui se maintiennent dans une sorte d'éther. Un peu comme ce bruit des moteurs que l'on découvre lorsque l'on se réveille, au milieu d'un vol transatlantique, dans une cabine par ailleurs silencieuse ou ceux, plus naturels, de la pluie, du vent, des vagues.
Mais revenons à ces quelques mots que j'ai choisis d'entrée pour décrire cette compositrice et sa musique. Radicale, Éliane Radigue l'est : jamais elle n'a dévié du chemin abrupt qu'elle a emprunté dès ses premières oeuvres créées pour accompagner des environnements de plasticiens. Expérience initiale qui l'a amenée à entretenir une relation très intime avec l'espace. Chacun de ses concerts est, d'abord, exploration de la salle où il sera donné. La pièce jouée doit s'y glisser, s'y imposer. Ce qu'elle fait de manière chaque fois différente.
Inclassable, elle l'est tout autant. Nombreux sont les observateurs qui ont voulu l'associer au mouvement minimaliste, ce qu'ils ont fait d'autant plus volontiers qu'elle a travaillé à New York et a été proche de plusieurs des compositeurs de cette école. Mais sa démarche est toute différente, bien moins conceptuelle : elle fait une musique de sons et non de notes.
D'autres l'ont rapprochée de ceux qui produisent des musiques de bourdonnement, des drones, sans saisir tout ce qui sépare ses oeuvres de celles des pionniers de ce mouvement, Phill Niblock, Ellen Fullman ou Paul Panheuysen, et de leurs multiples suiveurs.
D'autres encore ont évoqué une tradition mystique, l'Inde, le bouddhisme, la méditation... cherchant dans sa biographie, dans l'intérêt que révèlent plusieurs de ses titres pour le Tibet et la pensée orientale (Les chants de Milarepa, Kyema, Kialasha...) de quoi alimenter leur thèse, sans voir que si sa musique prête à la méditation, Éliane Radigue avait entamé son exploration des sons tenus bien avant de découvrir la spiritualité orientale.
Présentation de l'éditeur :
Vous n'avez pas idée de ce qu'il y a dans un seul son !
Il y a même des contrepoints si on veut, des décalages de timbres différents.
Il y a même des harmoniques qui donnent des effets tout à fait différents qui ne sortent pas seulement du son mais qui entrent au centre du son.
Giacinto Scelsi
S'il me fallait de quelques mots définir la musique d'Éliane Radigue, je dirais qu'elle est radicale, inclassable et à nulle autre pareille. J'ajouterais qu'il faudrait, pour la décrire, emprunter au vocabulaire des peintres, parler de drapés, évoquer ces toiles de Rothko dont on découvre, lorsqu'on les regarde de près, qu'elles sont riches de milles couches superposées de couleurs et de lumière. Il faudrait parler de ces sons qui flottent lentement, qui évoluent imperceptiblement, si discrètement que l'auditeur saisit à peine le moment où il se passe quelque chose de nouveau et ne sait plus, à la fin, très bien la distinguer du silence dans lequel elle s'éteint.
Musique de la lenteur, de l'infime vibration d'ondes qui se maintiennent dans une sorte d'éther. Un peu comme ce bruit des moteurs que l'on découvre lorsque l'on se réveille, au milieu d'un vol transatlantique, dans une cabine par ailleurs silencieuse ou ceux, plus naturels, de la pluie, du vent, des vagues.
Mais revenons à ces quelques mots que j'ai choisis d'entrée pour décrire cette compositrice et sa musique. Radicale, Éliane Radigue l'est : jamais elle n'a dévié du chemin abrupt qu'elle a emprunté dès ses premières oeuvres créées pour accompagner des environnements de plasticiens. Expérience initiale qui l'a amenée à entretenir une relation très intime avec l'espace. Chacun de ses concerts est, d'abord, exploration de la salle où il sera donné. La pièce jouée doit s'y glisser, s'y imposer. Ce qu'elle fait de manière chaque fois différente.
Inclassable, elle l'est tout autant. Nombreux sont les observateurs qui ont voulu l'associer au mouvement minimaliste, ce qu'ils ont fait d'autant plus volontiers qu'elle a travaillé à New York et a été proche de plusieurs des compositeurs de cette école. Mais sa démarche est toute différente, bien moins conceptuelle : elle fait une musique de sons et non de notes.
D'autres l'ont rapprochée de ceux qui produisent des musiques de bourdonnement, des drones, sans saisir tout ce qui sépare ses oeuvres de celles des pionniers de ce mouvement, Phill Niblock, Ellen Fullman ou Paul Panheuysen, et de leurs multiples suiveurs.
D'autres encore ont évoqué une tradition mystique, l'Inde, le bouddhisme, la méditation... cherchant dans sa biographie, dans l'intérêt que révèlent plusieurs de ses titres pour le Tibet et la pensée orientale (Les chants de Milarepa, Kyema, Kialasha...) de quoi alimenter leur thèse, sans voir que si sa musique prête à la méditation, Éliane Radigue avait entamé son exploration des sons tenus bien avant de découvrir la spiritualité orientale.
Pionnière de la musique sur synthétiseur - instrument auquel elle a donné quelques-uns de ses chefs-d'oeuvre -, proche de Pierre Schaeffer et de Pierre Henry dans les années cinquante, des peintres de l'avant-garde française et new-yorkaise dans les années soixante et soixante-dix, Éliane Radigue a construit, loin des milieux musicaux officiels, l'une des productions les plus originales de ces cinquante dernières années.
Sa conception du temps musical fascine ses auditeurs depuis des décennies. De nombreux jeunes compositeurs s'intéressent aujourd'hui à son travail et s'en inspirent.
Dans cet ouvrage, Éliane Radigue nous parle des sons qu'elle utilise, de leur découverte et de leur apprentissage. Elle relate, enfin, son parcours au sein d'un monde musical longtemps fermé aux femmes compositrices.
Bernard Girard, philosophe, spécialiste de l'avant-garde, auteur d'un ouvrage de référence sur le lettrisme et d'un livre d'entretiens avec Tom Johnson, producteur d'émissions radiophoniques consacrées à la musique contemporaine.
Sa conception du temps musical fascine ses auditeurs depuis des décennies. De nombreux jeunes compositeurs s'intéressent aujourd'hui à son travail et s'en inspirent.
Dans cet ouvrage, Éliane Radigue nous parle des sons qu'elle utilise, de leur découverte et de leur apprentissage. Elle relate, enfin, son parcours au sein d'un monde musical longtemps fermé aux femmes compositrices.
Bernard Girard, philosophe, spécialiste de l'avant-garde, auteur d'un ouvrage de référence sur le lettrisme et d'un livre d'entretiens avec Tom Johnson, producteur d'émissions radiophoniques consacrées à la musique contemporaine.
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- ÉditeurEditions Aedam Musicae
- Date d'édition2013
- ISBN 10 2919046136
- ISBN 13 9782919046133
- ReliureBroché
- Nombre de pages144
(Aucun exemplaire disponible)
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