Présentation de l'éditeur :
Kurt Gödel et Alan Turing, deux des plus grands mathématiciens du XXe siècle, ne se sont jamais rencontrés. Mus par une curiosité sans cesse renouvelée, hostiles aux conformismes en vigueur, ils ont tous deux connu une fin tragique. Janna Levin raconte ici deux existences parallèles : les rencontres de Gödel avec Wittgenstein et les membres du Cercle de Vienne au Café Josephinum, l'assassinat de son ami Moritz Schlick, l'exil américain, la difficile vie de couple ; les expériences traumatisantes du jeune Turing dans un internat anglais, ses conversations avec Wittgenstein à Cambridge, ses amours malheureuses et sa condamnation pour homosexualité.
L'inquiétude intellectuelle des deux mathématiciens se manifeste à chaque page, notamment à travers leurs tentatives pour se comprendre eux-mêmes à la lumière de découvertes scientifiques.
Langue éminemment poétique, prose incantatoire, échanges philosophiques stylisés : à l'évidence, le roman de Levin ne se réduit pas à un simple assemblage d'éléments biographiques. Nous sommes ici conviés dans l'esprit même d'une narratrice très particulière, dont les sombres obsessions existentielles entrent en résonance avec celles de ses deux personnages.
The New York Times Book Review
Janna Levin enseigne la physique et l'astronomie à l'université Columbia, à New York.
Extrait :
Vienne, Autriche. 1931.
La scène est dans un café. Le Café Josephinum, c'est d'abord une odeur - l'acre odeur d'un café turc torréfié, qui, trop lourde pour flotter dans l'air, attend d'y être soulevée par la vapeur vigoureuse qui s'échappe des casseroles où frémit le café. En inhalant les vapeurs de la pièce, les clients se sentent déjà stimulés. Le café se présente en premier lieu dans le cerveau sous forme d'une senteur délicieuse et humide ; en second lieu, il évoque le souvenir d'une salle parée de miroirs - un souvenir presque aussi stimulant que la vision de la salle même, qui n'apparaît qu'en troisième lieu. Le café est comme un combustible pour les idées. Un combustible dont se nourrit l'espoir fervent que la moisson des arts, de la logique et des mots sera plus riche que jamais, parce que seule la plus féconde des saisons permettra de soutenir le siège de cet hiver terrible et le siège de cette guerre terrible. Des noms se distinguent, puis sont oubliés. Des vers immortels sont écrits et d'autres aussi, moins immortels. Des artistes règlent leurs dettes en oeuvres qui colorent les murs pendant que d'autres murs sont livrés à une aimable décrépitude. Dehors, Vienne se dégrade ou se rénove par fragments, dessinant un jardin composite et presque à l'abandon.
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