In-4° broché, 2 pages. Quelques jours avant la dissolution de l'Assemblée nationale (28 septembre 1791), le député Adrien Duport, membre du Club des Jacobins, monte contre toute attente à la tribune et déclare : « Je crois que la liberté de culte ne permet aucune distinction dans les droits politiques des citoyens en raison de leur croyance. La question de l'existence politique [des Juifs] a été ajournée. Cependant, les Turcs, les Musulmans, les hommes de toutes les sectes, sont admis à jouir en France des droits politiques. Je demande que l'ajournement soit révoqué et qu'en conséquence il soit décrété que les Juifs jouiront en France des droits de citoyen actif. » Cette proposition est acceptée avec de forts applaudissements. Rewbell essaye, cependant, de s'opposer à la motion mais il est interrompu par Michel Regnaud de Saint-Jean d'Angély, président de l'Assemblée, qui « demande que l'on rappelle à l'ordre tous ceux qui parleront contre cette proposition, car c'est la Constitution elle-même qu'ils combattront ». L'Assemblée vote alors, sans autre discussion, la motion de Duport et, le lendemain, adopte définitivement la rédaction de la loi. Deux jours plus tard, l'Assemblée nationale se sépare et, le 13 novembre, Louis XVI ratifie la loi déclarant les Juifs citoyens français. On date des 27-28 septembre 1791 l'Émancipation des Juifs de France. En réalité deux émancipations se sont opérées: une en janvier 1790 pour les Juifs sépharades du Sud-Ouest et Avignonnais et une autre pour les Askénazes (1791); l'une dans une logique d'Ancien Régime reconnaissant les Juifs comme un groupe, l'autre plus moderne, comme individus. Mais une relecture attentive des conditions de l'élaboration du décret, bien connu, de 1791 atténue sa portée jacobine. Napoléon l'accentuera, unifiant dans le principe le statut des uns et des autres. Ainsi une première formulation, le 27 septembre 1791, stipulait que les Juifs jouiraient en France des droits de citoyens actifs. Proposition adoptée par l'Assemblée sans autres précisions. Mais le lendemain, le Comte de Broglie, hostile à un tel décret, afin qu'il ne puisse en Alsace être mal interprété et provoquer des troubles, demanda que l'on précise que la prestation du serment civique « sera regardée comme une renonciation formelle aux lois civiques et politiques auxquelles les individus Juifs se croient particulièrement soumis ». Amendement adopté par l'Assemblée mais contredit par celui de Prugnon: « Je demande qu'au lieu de mettre: sera regardé comme une renonciation à leurs lois civiles, etc., on mette: sera regardé comme une renonciation à leurs privilèges: car les lois civiles des Juifs sont identifiées à leurs lois religieuses, et il n'est pas dans notre intention d'exiger qu'ils abjurent leur religion ». Amendement aussi adopté. L'esprit qui a commandé la rédaction finale du décret apparaît ambigu et aboutit à une formulation ferme dans les termes mais floue dans leur incidence. En effet, on ne précise pas les renonciations que l'on attend des Juifs. Il semblerait que l'adoption de l'amendement Prugnon substituant le mot « privilège » à celui de « lois civiles » proposé par de Broglie, laisse aux Juifs une certaine marge de « manoeuvre » dans ce domaine (qui inclut droit personnel, successoral, matrimonial .). La rédaction finale suggère donc que le maintien des lois civiles n'est pas considéré comme un privilège. L'ambiguïté du décret est à l'image de cette journée du 28 septembre qui voit d'une part la rédaction du décret « émancipateur » adopté la veille dans son principe et d'autre part l'adoption d'un décret « d'accompagnement » qui en contredit l'esprit. En effet sous prétexte de prévenir des troubles en Alsace, l'Assemblée demanda aux Juifs de remettre dans le mois un état de leurs créances en vue de la liquidation des dettes. N° de réf. du vendeur oli3491
Titre : Loi relative aux Juifs. Donnée à Paris, le ...
Éditeur : Dijon, Imprimerie de Capel
Date d'édition : 1791
Reliure : Couverture souple
Etat : Très bon
Edition : Edition originale
Description du livre Couverture souple. Etat : Très bon. Edition originale. In-4° broché, 2 pages. Quelques jours avant la dissolution de l'Assemblée nationale (28 septembre 1791), le député Adrien Duport, membre du Club des Jacobins, monte contre toute attente à la tribune et déclare : « Je crois que la liberté de culte ne permet aucune distinction dans les droits politiques des citoyens en raison de leur croyance. La question de l'existence politique [des Juifs] a été ajournée. Cependant, les Turcs, les Musulmans, les hommes de toutes les sectes, sont admis à jouir en France des droits politiques. Je demande que l'ajournement soit révoqué et qu'en conséquence il soit décrété que les Juifs jouiront en France des droits de citoyen actif. » Cette proposition est acceptée avec de forts applaudissements. Rewbell essaye, cependant, de s'opposer à la motion mais il est interrompu par Michel Regnaud de Saint-Jean d'Angély, président de l'Assemblée, qui « demande que l'on rappelle à l'ordre tous ceux qui parleront contre cette proposition, car c'est la Constitution elle-même qu'ils combattront ». L'Assemblée vote alors, sans autre discussion, la motion de Duport et, le lendemain, adopte définitivement la rédaction de la loi. Deux jours plus tard, l'Assemblée nationale se sépare et, le 13 novembre, Louis XVI ratifie la loi déclarant les Juifs citoyens français. On date des 27-28 septembre 1791 l'Émancipation des Juifs de France. En réalité deux émancipations se sont opérées: une en janvier 1790 pour les Juifs sépharades du Sud-Ouest et Avignonnais et une autre pour les Askénazes (1791); l'une dans une logique d'Ancien Régime reconnaissant les Juifs comme un groupe, l'autre plus moderne, comme individus. Mais une relecture attentive des conditions de l'élaboration du décret, bien connu, de 1791 atténue sa portée jacobine. Napoléon l'accentuera, unifiant dans le principe le statut des uns et des autres. Ainsi une première formulation, le 27 septembre 1791, stipulait que les Juifs jouiraient en France des droits de citoyens actifs. Proposition adoptée par l'Assemblée sans autres précisions. Mais le lendemain, le Comte de Broglie, hostile à un tel décret, afin qu'il ne puisse en Alsace être mal interprété et provoquer des troubles, demanda que l'on précise que la prestation du serment civique « sera regardée comme une renonciation formelle aux lois civiques et politiques auxquelles les individus Juifs se croient particulièrement soumis ». Amendement adopté par l'Assemblée mais contredit par celui de Prugnon: « Je demande qu'au lieu de mettre: sera regardé comme une renonciation à leurs lois civiles, etc., on mette: sera regardé comme une renonciation à leurs privilèges: car les lois civiles des Juifs sont identifiées à leurs lois religieuses, et il n'est pas dans notre intention d'exiger qu'ils abjurent leur religion ». Amendement aussi adopté. L'esprit qui a commandé la rédaction finale du décret apparaît ambigu et aboutit à une formulation ferme dans les termes mais floue dans leur incidence. En effet, on ne précise pas les renonciations que l'on attend des Juifs. Il semblerait que l'adoption de l'amendement Prugnon substituant le mot « privilège » à celui de « lois civiles » proposé par de Broglie, laisse aux Juifs une certaine marge de « manoeuvre » dans ce domaine (qui inclut droit personnel, successoral, matrimonial .). La rédaction finale suggère donc que le maintien des lois civiles n'est pas considéré comme un privilège. L'ambiguïté du décret est à l'image de cette journée du 28 septembre qui voit d'une part la rédaction du décret « émancipateur » adopté la veille dans son principe et d'autre part l'adoption d'un décret « d'accompagnement » qui en contredit l'esprit. En effet sous prétexte de prévenir des troubles en Alsace, l'Assemblée demanda aux Juifs de remettre dans le mois un état de leurs créances en vue de la liquidation des dettes. N° de réf. du vendeur ASY5790