Extrait :
PRÉ ROMANTISME ET NÉOCLASSICISME
L'Europe du XVIIIe siècle avait longtemps paru dominée par la seule influence française : la monarchie de Louis XIV était sortie épuisée mais victorieuse de la guerre de Succession d'Espagne. C'est à Versailles que les adversaires de la France vont chercher des modèles de style architectural, c'est des écrivains français que se réclamera Frédéric II de Prusse.
Une seule influence paraît contrebalancer cette domination, celle de l'Angleterre, mais qui est d'abord limitée aux idées philosophiques, à la jurisprudence, à la «liberté de pensée» : Voltaire tente d'introduire Shakespeare sur le théâtre parisien. Vers 1770, un grand changement devient perceptible dans les mentalités, et l'art en présente les signes.
La découverte (1750) et l'exploration de Pompéi et d'Herculanum fournissent aux historiens la date repère de l'apparition du néoclassicisme : expression ambiguë, inventée bien après coup (vers 1880 !) pour désigner des objets d'art hybrides, à la changeante faveur commerciale. Il s'agit, à l'époque, moins d'un retour aux canons esthétiques de Le Brun, par exemple, que d'un contact direct, au demeurant imaginatif, avec l'Antiquité gréco-romaine.
En outre, depuis 1725 environ, tout jeune Anglais un peu fortuné se doit d'accomplir le «grand tour», c'est-à-dire de parcourir l'Europe continentale à des fins éducatives. Il visite la France, la Suisse et l'Italie ; si les beaux-arts l'intéressent, il devient le commis voyageur plus ou moins bénévole des échanges artistiques tant vers l'Angleterre qu'entre les pays «producteurs». Si Paris demeure le centre créatif le plus intense, l'Italie toujours aussi morcelée voit la décadence de Venise et la transformation cosmopolite de Rome.
En architecture, domaine où la France dicte la mode à presque toute l'Europe, le contact avec les modèles antiques n'a pas été très difficile à rétablir : Gabriel se souvient de Palladio jusque dans le Petit Trianon (achevé en 1768). En sculpture, face à l'épuisement des décors «rococo» à la cour de Vienne et dans les capitales qui en dépendent, les maîtres français brillent par une volonté expressive qui déborde le cadre classique : le premier, Falconet a voulu une sculpture «vivante, animée, passionnée» applaudie par Diderot (statue équestre de Pierre I" de Russie, achevée en 1778). Si Houdon renoue avec les grâces de la Renaissance française (Diane, musée du Louvre), il n'en est pas moins un portraitiste vigoureux (il ira en Amérique immortaliser le général Washington) auquel ses contemporains reprochent de «manquer d'idéal» ! À plus forte raison, Pigalle provoque le public (1776) en sculptant Voltaire pratiquement nu sous une robe de chambre. Pourtant, en architecture, et accessoirement dans la sculpture décorative, on assiste aussi à la reviviscence du style palladien, transmis presque sans hiatus des dernières villas vénitiennes du XVIe siècle à des maisons de campagne britanniques. Ce style simple, tranquille et aéré, repasse en France, notamment en Aquitaine. Et ce qui sera aussi lourd de conséquences, il apparaît sur un continent nouveau.
Présentation de l'éditeur :
Apparu simultanément en Allemagne, en Angleterre et dans le développement intellectuel issu de la Révolution française, l'art romantique domine l'Europe pendant la première moitié du XIXe s, jusqu’à la révolution de 1848.
Davantage état d'esprit que mouvement constitué, le romantisme émergea des contradictions d'une époque qui mêla néoclassicisme, redécouverte des antiquités nationales, influence du genre romanesque naissant et retour à la nature.
Construit de façon chronologique, L'Art romantique montre comment la volonté de se consacrer au service de leur art et de l'humanité poussa les artistes romantiques hors des sentiers de l'académisme.
Si les peintres - de Caspar-David Friedrich à Turner en passant par David, Goya, Géricault ou même Ingres - jouèrent un rôle de premier plan, les graveurs, tels Achille Devéria ou Gustave Doré, s'affirmèrent aussi comme une composante inséparable du romantisme.
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