Ce que je sais - Couverture souple

Cowan,Andrew

Couverture souple

ISBN 10 : 2070787184 ISBN 13 : 9782070787180

Editeur : Joëlle Losfeld, 2007

A propos du livre

Extrait :

Je m'appelle Mike Hannah et j'ai quarante ans. J'ai quarante ans aujourd'hui, et c'est un âge que je n'ai jamais trouvé particulièrement intéressant. Je ne crois pas que ma vie en soit arrivée à un point où elle va commencer, elle va tout simplement se poursuivre. A ce jour, mes meilleures années ne sont pas plus derrière moi qu'elles ne l'étaient jusque-là.
J'ai quarante ans et je suis allongé, presque entièrement nu, sur le sol en stratifié de notre salle à manger, les yeux levés vers la chambre à coucher d'une jeune fille qui vient de se laver les cheveux. Sa maison, celle dont elle est locataire, est adossée à la nôtre, et jusqu'à aujourd'hui, jusqu'au moment où j'ai abattu les arbres qui enfermaient notre jardin, je n'aurais pas pu la voir, pas de là où je me trouve, bien que sa fenêtre ait toujours été visible depuis la chambre de notre plus jeune fils, ainsi que depuis le bureau du grenier. C'est une étudiante et elle partage cette maison avec deux colocataires, un garçon et une fille. Il y a beaucoup de maisons louées à des étudiants dans notre quartier. Et aussi beaucoup de maisons avec des familles.
Dans la mienne, il y a moi, ma femme Jan - c'est le diminutif de Janette - et nos deux fils : Jack, qui a dix ans, et Ben, presque six. Ce sont de bons garçons, qui n'ont rien de secret, et le plus jeune est né ici. Jan était enceinte quand nous avons emménagé, et c est son état, j en suis convaincu, qui nous a amenés à finaliser l'achat très vite, avant de l'avoir vraiment décidé. Lors de la première visite, nous avions eu l'impression que l'endroit était sombre et exigu, et à cette époque-là déjà, les arbres, des conifères, étaient trop épais et trop grands. À cause de leur présence, ça manquait d'air, ou ça semblait en manquer. Quand on était dans le jardin, on n'avait pas l'impression d'être à l'extérieur; on ne respirait pas plus librement.
C est le milieu de la soirée et nous sommes à la mi-mai, et cette journée a commencé très tôt pour moi - peu après cinq heures - au moment où je me suis réveillé alors que je rêvais de Sarah, une fille que je connaissais à une époque où je partageais une location avec d'autres, quand moi aussi j'étais étudiant. La plupart des hommes ont eu, j'imagine, une Sarah quelque part dans leur vie, et peut-être que vous aussi vous en avez une à laquelle vous rêvez. Je ne rêve pas de la mienne très souvent - pas autant que par le passé - mais il m'en reste toujours quelque chose, une gêne, une humeur qui m'assaille et dont je ne peux me défaire et qui me dure toute la journée. En général, les détails s'estompent rapidement, mais cette fois, je me souviens d'un court de squash, tout blanc, et aussi que je perdais. Je ne me souviens pas de mon partenaire. Sarah m'a tapoté le bras et m a demandé si je recevais ses appels téléphoniques. Oui, j'ai placé ton téléphone sur écoute, ai-je répondu. Elle avait envie de bavarder. J'ai mis ma raquette sur mon épaule et j'ai répondu à ses questions. Je lui parlais d'un ton assez froid, et puis elle s'est mise à rire et j'ai souri. Je l'ai regardée dans les yeux. Mais comme ça - rien de torride ni de sexuel - mais en me réveillant,) ai cherché la main de Jan et je l'ai serrée. Elle s'est éloignée de moi en roulant sur le côté, sans se réveiller et, sans bruit, j'ai descendu les escaliers en T-shirt et caleçon. J'avais peur de réveiller Ben, qui s'était mis au lit avec tous les cadeaux qu'il me destinait.
Le jour de mon anniversaire ne devait pas être différent des autres jours, rien de «spécial» n'était prévu même si, pour faire plaisir aux garçons, il y aurait un petit déjeuner au lit, avec les cadeaux et les cartes; ensuite, s'ils en avaient envie, ils pourraient me gâter toute la soirée - m'apporteraient une pipe et des pantoufles imaginaires. Mais à part cela, ce ne serait pas un grand jour, pas de fête ni d'amis. J'irais travailler comme d'habitude, si toutefois j'avais du travail à faire.
Je suis détective privé, et ces derniers temps, les affaires sont plutôt calmes. Ma femme est prof de maths.
«En quel honneur est-ce qu'on ferait la fête ?
- Le tien, avait-elle dit.
- Pas vraiment suffisant, dans ce cas», dis-je en riant, et elle m'avait regardé ébahie. Elle était déçue, peut-être même en colère. Je ne me contentais pas de refuser de faire la fête pour ma seule personne, mais par la même occasion, je refusais de faire la fête pour ma vie, et cela voulait aussi dire pour Jan. Ça faisait maintenant dix-huit ans que nous étions ensemble, seize que nous étions mariés.

Présentation de l'éditeur :

Mike Hannah mène une vie calme et ordinaire avec sa femme et ses deux enfants dans une banlieue cossue en Angleterre, et travaille comme privé pour un cabinet d'assurances. Le jour de ses quarante ans, il entreprend des travaux dans son jardin et se blesse au dos. En partie immobilisé, comme le héros de son film préféré, Fenêtre sur cour, Mike guette, espionne, puis traque chacun des faits et gestes de ses proches, épie sa femme et son voisinage. Voyeur par simple curiosité pour alimenter son imaginaire afin de tromper son ennui, il comprend à son corps défendant qu'il est passé à côté de son existence. Car à force d'observer la vie des autres, on est parfois pris à son propre piège...

Andrew Cowan est né à Corby dans le Northamptonshire en 1960. Il est l'auteur de quatre romans. Souvent récompensé par des prix littéraires, il s'est vu attribuer le Arts Council Writer's Award en 2004 pour l'intégralité de son oeuvre. Ce que je sais est le deuxième ouvrage de cet auteur traduit en français.

À propos de cette édition

• Éditeur: Joëlle Losfeld
• Date d'édition: 2007
• ISBN 10: 2070787184
• ISBN 13: 9782070787180
• Reliure: Broché
• Nombre de pages: 280