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Extrait :
Grève du mal
Vint le jour où le Démon - ou l'un de ses représentants -, dégoûté par la campagne d'épuration entreprise avec des moyens grandioses par le nouveau gouvernement, organisa la grève du mal.
«Qu'on me persécute un peu, se disait-il, c'est compréhensible et légitime ; et même je souhaite qu'il en soit ainsi : malheur à moi si on me laissait trop tranquille. Ça me sert au moins à garder la forme. Mais là j'ai l'impression qu'on va trop loin. Alors vous savez ce que je vais faire ? Je vais me retirer complètement de la scène, je vais vous laisser vous débrouiller tout seuls. Et rira bien qui rira le dernier.»
Cela faisait des mois que le nouveau gouvernement avait entamé une action d'envergure contre les crimes, l'immoralité, les vices et les maladies physiques. Mais la goutte qui fit déborder le vase, ce fut la campagne de vaccination collective contre le péché originel.
Ce vaccin, apparenté aux thymols et aux psychotropes à base de méprobamates, devait bouleverser radicalement l'attitude morale de l'homme. Au lieu d'être prédisposé au mal par son caractère, l'homme, après le traitement, ressentirait une attirance irrésistible pour le bien, comme Adam et Eve avant le faux pas ; en fin de compte, tout le monde devait accéder à une sorte de sainteté, et la grâce, si difficile à obtenir, ne servirait plus à rien.
Ce n'est pas que le Démon ait vraiment cru à l'efficacité du vaccin. Cela lui donnait même envie de rire. Mais rien que l'idée le faisait enrager. Jamais, depuis que le monde était monde, les hommes n'avaient osé le défier de la sorte avec autant d'effronterie. Voilà pourquoi il organisa la grève.
Dans tout le pays, l'activité maléfique s'interrompit d'une minute à l'autre, exactement comme cela se passe lors des grèves. Les hommes cessèrent de voler, tuer, duper, médire, forniquer, et cetera ; simultanément, ils cessèrent de tomber malades : ce jour-là il n'y eut pas même un ongle incarné.
Présentation de l'éditeur :
Vint le jour où le Démon - ou l'un de ses représentants -, dégoûté par la campagne d'épuration entreprise avec des moyens grandioses par le nouveau gouvernement, organisa la grève du mal.
«Qu'on me persécute un peu, se disait-il, c'est compréhensible et légitime ; et même je souhaite qu'il en soit ainsi : malheur à moi si on me laissait trop tranquille. Ça me sert au moins à garder la forme. Mais là j'ai l'impression qu'on va trop loin. Alors vous savez ce que je vais faire ? Je vais me retirer complètement de la scène, je vais vous laisser vous débrouiller tout seuls. Et rira bien qui rira le dernier.»
Cela faisait des mois que le nouveau gouvernement avait entamé une action d'envergure contre les crimes, l'immoralité, les vices et les maladies physiques. Mais la goutte qui fit déborder le vase, ce fut la campagne de vaccination collective contre le péché originel.
Ce vaccin, apparenté aux thymols et aux psychotropes à base de méprobamates, devait bouleverser radicalement l'attitude morale de l'homme. Au lieu d'être prédisposé au mal par son caractère, l'homme, après le traitement, ressentirait une attirance irrésistible pour le bien, comme Adam et Eve avant le faux pas ; en fin de compte, tout le monde devait accéder à une sorte de sainteté, et la grâce, si difficile à obtenir, ne servirait plus à rien.
Ce n'est pas que le Démon ait vraiment cru à l'efficacité du vaccin. Cela lui donnait même envie de rire. Mais rien que l'idée le faisait enrager. Jamais, depuis que le monde était monde, les hommes n'avaient osé le défier de la sorte avec autant d'effronterie. Voilà pourquoi il organisa la grève.
Dans tout le pays, l'activité maléfique s'interrompit d'une minute à l'autre, exactement comme cela se passe lors des grèves. Les hommes cessèrent de voler, tuer, duper, médire, forniquer, et cetera ; simultanément, ils cessèrent de tomber malades : ce jour-là il n'y eut pas même un ongle incarné.
Dino Buzzati excelle dans l'art de la nouvelle, il y a trouvé la forme qui correspond à son idéal de conteur. Textes imperceptiblement fantastiques, ces Nouvelles inquiètes ouvrent la porte de l'"autre monde" de Buzzati, où "souvent rien n'est ce qu'il paraît, où passé et présent se confondent, où réalité et imagination sont des paroles qui n'ont pas de sens". L'inquiétude naît alors de ce que nous découvrons que le rêve a une puissance insoupçonnée, que la frontière réputée infranchissable entre la vie et la mort est poreuse, que les hommes invraisemblables qui y sont décrits sont pourtant bien nos semblables.On retrouve dans ces textes les thématiques récurrentes de Buzzati : la fuite du temps, l'omniprésence de la mort, la critique de la société et les difficiles rapports que les hommes y entretiennent. Mais toujours l'évocation du poids du destin qui pèse sur nous s'accompagne d'ironie, parfois mordante.
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- ÉditeurRobert Laffont
- Date d'édition2006
- ISBN 10 2221106172
- ISBN 13 9782221106174
- ReliureBroché
- Nombre de pages396
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NOUVELLES INQUIETES
Edité par
ROBERT LAFFONT
(2006)
ISBN 10 : 2221106172
ISBN 13 : 9782221106174
Neuf
Paperback
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Evaluation vendeur
Description du livre Paperback. Etat : NEUF. À l'occasion du centenaire de la naissance de Dino Buzzati, ce premier volume d'un diptyque rassemble quarante-neuf nouvelles inédites en France.Dino Buzzati excelle dans l'art de la nouvelle, il y a trouvé la forme qui correspond à son idéal de conteur. Les nouvelles réunies ici, publiées de son vivant dans Il Corriere della Sera, sont extraites d'un recueil paru en Italie il y a trois ans seulement, et salué par la presse. Un second volume à paraître prochainement en présentera un autre choix.Textes imperceptiblement fantastiques, les Nouvelles inquiètes diffusent une inquiétude dérangeante qui déplace la frontière entre la réalité et l'imaginaire, la vie et la mort.Ces quarante-neuf courts textes ouvrent la porte de l'" autre monde " de Buzzati, où " souvent rien n'est ce qu'il paraît, où passé et présent se confondent, où réalité et imagination sont des paroles qui n'ont pas de sens ". L'inquiétude naît alors de ce que nous découvrons que le rêve a une puissance insoupçonnée, que la frontière réputée infranchissable entre la vie et la mort est poreuse, que les hommes invraisemblables qui y sont décrits sont pourtant bien nos semblables.Brièveté, précision, élégance et économie : des qualités buzzatiennes particulièrement remarquables dans ces nouvelles au pessimisme existentiel plein d'ironie.On retrouve dans ces nouvelles les thématiques récurrentes de Buzzati : la fuite du temps, l'omniprésence de la mort, la critique de la société et les difficiles rapports que les hommes y entretiennent, notamment. Mais toujours l'évocation du poids du destin qui pèse ainsi sur nous s'accompagne d'ironie, parfois mordante ; et du détachement qu'elle provoque, Buzzati nous convie à une lucidité rebelle et souriante à l'égard du destin qui nous accable. - Nombre de page(s) : - Poids : 0g - Langue : fre - Genre : Littérature Anglo-Saxonne PAVILLONS. N° de réf. du vendeur N9782221106174
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