Extrait :
La fin de l'histoire
C'est la fin de l'histoire et vous ne le savez pas. Il est là, debout devant la fenêtre, et vous lui en voulez de masquer la lumière. Ce n'est pas lui que vous voyez mais le jour qu'il empêche d'entrer. Ça commence comme ça. Il est là et sa présence vous gêne. Vous ne l'attendez plus. Vous rentrez le soir et vous allumez la radio. Un baiser distrait après avoir quitté vos chaussures. Le silence tout de suite après. Vous ne savez comment c'est arrivé. Depuis combien de temps. Vous pensiez que ce ne serait pas possible. Pas lui, pas vous. Vous connaissiez les pièges, le quotidien, les courses. Il paraît que les lessives tuent l'amour. Vous n'y avez jamais cru, vous refusez de vous laisser enfermer dans pareil cliché. Et pourtant, la fumée de sa cigarette vous gêne. C'est un signe. Vous renoncez à interpréter les signes.
Vous n'avez rien vu venir et vous ne l'aimez plus. Vous demandez à vérifier. Il s'agit d'être sûr. Mais vous doutez. En fait, vous l'aimez et ne l'aimez pas à la fois. Il faudrait vous décider, ça devient agaçant. Vous 1 aimez pensez-vous, mais ne supportez pas quand il traverse le salon en peignoir. Quand il s'installe devant la télévision dans cette tenue, les cheveux encore mouillés, plaqués en arrière. Lui, sans doute vous l'aimez, mais c'est la même scène répétée chaque jour qui vous indispose. Il ne s'agit pas de tout mélanger. Ce qui est sûr, c'est que vous éprouvez de la tendresse pour lui. C'est ce que l'on dit, paraît-il, quand on n'aime plus. Plus on éprouve de tendresse et moins on aime, alors ? Mais qui peut dire la différence entre les deux ? La tendresse, c'est quand on n'a pas de désir. On se caresse la joue avant de s'endormir. C'est Pimprenelle et Nicolas.
Présentation de l'éditeur :
Onze destins, onze nouvelles racontent la fin de l'amour. Avec une justesse et une précision douloureuse Brigitte Giraud ausculte le désir moribond, les compromis honteux, les naufrages intimes et les silences des couples en train de se perdre. Elle traque les mensonges et le deuil, l'exil intérieur, la vie qui bascule et chacune de ses phrases, chacun de ses personnages nous tend un miroir.
«La romancière autopsie avec une rare acuité la fin de passion.»
LE MONDE
Brigitte Giraud est née en Algérie et vit aujourd'hui à Lyon. Elle est l'auteur de quatre romans : La chambre des parents (Fayard, 1997), Nico (Stock, 1999), Marée noire (Stock, 2004), J'apprends (Stock, 2005), d'un récit : À présent (Stock, 2001) et d'un recueil de nouvelles : L'amour est très surestimé (Stock, 2007) pour lequel elle a obtenu la bourse Goncourt de la nouvelle 2007.
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