Présentation de l'éditeur :
Dans ce recueil d'articles écrits entre 1947 et 1955 figurent tous les thèmes chers à Henri Calet : souvenirs d'enfance dans le quartier populaire de Ménilmontant, où l'on croise des personnages infiniment attachants, visites émerveillées à travers Paris, voyages cocasses qui sont l'occasion de croquer ses contemporains «vus par le trou de la serrure», enfin scènes d'anthologie sur la triste condition d'écrivain...
Cynique, désabusé, Calet ? Non, au contraire, rarement auteur fut aussi sensible que lui. Chacune de ses phrases est un réquisitoire contre la misère, incite à la redécouverte des petits bonheurs du quotidien. Et puis quel enchantement, cette extrême fantaisie distillée par Henri Calet, qu'il se prenne un pied dans la gamelle d'un chien, qu'il s'arrête saisi d'admiration devant une asperge d'un kilo ou qu'il se balade avec un rôti de veau cru sous le bras !
Acteur et témoin est un livre gai, drôle et très émouvant sur lequel souffle un vent de liberté.
Henri Calet est né à Paris en 1904. Journaliste, écrivain, il a signé une quinzaine de livres. Son style si particulier et son humanité débordante en font un auteur à part. Reconnu par la critique, il mérite largement de rencontrer les faveurs du public grâce à ces chroniques pleines de charme, au moment où l'on commémore le cinquantenaire de sa mort.
Extrait :
L'écrivain dans la bergerie
J'avais accepté de dédicacer mes livres dans un «grand magasin». Pourquoi pas ? il faut être dans le train. Après tout, c'était plutôt flatteur pour moi. Et puis, j'allais enfin pouvoir prendre contact avec ce public dont on parle tant. De l'écrivain au lecteur, sans intermédiaire. En tant qu'expérience, me disais-je, c'était intéressant. Depuis quelque temps, j'ai perdu toute ma timidité.
Un jour avant la date fixée, j'ai été rôder discrètement autour du magasin. On avait fait imprimer en masse des affichettes de couleur bleu pâle :
Henri CALET dédicacera ses oeuvres
Samedi prochain à partir de 14 h 30
Mon nom s'étalait sur toutes les vitrines en grosses lettres. Je me sentais assez confus.
Le samedi, je suis arrivé à l'heure exacte. J'avais rempli mon stylo. Ç'allait être un rude après-midi. Mais j'étais disposé à mettre la main à la pâte.
Deux demoiselles en noir m'attendaient ; elles m'étaient spécialement affectées ; elles m'ont invité à m'asseoir dans une sorte de loge au milieu de laquelle se trouvait une table. On avait pensé au coupe-papier et au buvard. C'était organisé de façon parfaite. J'étais entouré de mes livres en piles; en éventail; j'étais parmi mon oeuvre. En face, se tenait une caissière dans une cage, «ma» caissière. Nous étions prêts.
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