Prisonniers volontaires du r�ve Am�ricain - Couverture souple

Degoutin, St�phane

9782915456059: Prisonniers volontaires du r�ve Am�ricain

Couverture souple

ISBN 10 : 2915456054 ISBN 13 : 9782915456059

Editeur : La Villette, 2006

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Un mot de l'auteur :

Ce texte est la retranscription d'une enqu�te. Il part d'une interrogation sur la mani�re dont se construit la ville contemporaine apr�s la disparition de l'espace public au sens europ�en du terme, accessible � tous et libre d'acc�s. En 21 chapitres, et en changeant autant de fois de point de vue sur la question, j'interroge le ph�nom�ne troublant des quartiers ferm�s (gated communities), � mon sens symptomatique de l'�volution de la logique urbaine.

L'expression gated community, d'origine �tats-unienne, est intraduisible en fran�ais. Elle d�signe un quartier r�sidentiel entour� par une enceinte, ferm� par un portail d'acc�s contr�l� nuit et jour, o� l'on ne peut rentrer � moins d'�tre un habitant ou un invit�, parfois surveill�, � l'int�rieur, par des policiers priv�es. Le quartier est g�n�ralement administr� par une homeowner association, sorte d'association de propri�taires aux pouvoirs �tendus, qu'on a pu comparer � des gouvernements priv�s (l'homeowner association a notamment le pouvoir de faire un proc�s � un r�sident et de la chasser du quartier). Certaines gated communities abritent plusieurs milliers d'habitants. Les premi�res d'entre elles �taient con�ues pour un public ais�, mais on en construit aujourd'hui � destination des classes moyennes, ce qui a permis au ph�nom�ne de prendre beaucoup d'ampleur : aux Etats-Unis, on estime que 10 millions de personnes habitent dans ce type d'environnement. Le m�me ph�nom�ne se d�veloppe dans de tr�s nombreux pays du monde, en particulier en Am�rique du Sud, en Afrique du Sud, en Chine, en Russie (et dans une moindre mesure en Europe, notamment en France).

Le th�me provoque la curiosit�, car il �voque un univers incompr�hensible pour des Europ�ens. Lorsqu'on lit certaines descriptions de chercheurs (City of quartz de Mike Davis, Privatopia d'Evan McKenzie ou Fortress America de Blakely & Snyder...), on a parfois l'impression de lire de la science-fiction. Les environnements d�crits sont l'inverse exact de l'id�al europ�en de la ville. Il est d'ailleurs int�ressant de noter que le th�me a inspir� plusieurs auteurs et r�alisateurs de science-fiction : Neal Stephenson (Snowcrash), Octavia Butler (The parable of the Sower), James Graham Ballard (Running Wild, Super Cannes), Peter Weir (The Truman Show), un �pisode de la s�rie X-Files...

Pourtant, lorsqu'on se rend sur place, la premi�re chose qui frappe est la banalit�, cette d�concertante banalit� propre aux environnements suburbains am�ricains. J'ai voulu interroger le sentiment troublant que suscite le fait de se situer entre science-fiction et banalit�, entre Disneyland et ghetto.

Les gated communities ne constituent pas une rupture avec la logique de la ville am�ricaine, au contraire elles en sont l'aboutissement logique : environnement con�u pour la voiture, maisons vastes, sans cl�tures, centr�es sur l'int�rieur, architecture de promoteur, rues en nouilles, culs-de-sacs, peu de pi�tons... Les gated communities ne sont pas anormales aux Etats-Unis, elle sont juste extr�mes. Elles incarnent l'id�al r�sidentiel du R�ve Am�ricain, volont� de construire le paradis sur terre, r�sultat de la primaut� absolue accord�e au choix individuel, impliquant de choisir son lieu de r�sidence et son environnement social. Toute l'�volution de la banlieue am�ricaine tend vers cet id�al ; les gated communities n'en sont donc peut-�tre pas l'expression ultime.

St�phane Degoutin

Pr�sentation de l'�diteur :

Longtemps un �piph�nom�ne, les gated communities - enclaves r�sidentielles priv�es prot�g�es par des murs ou grilles et � l'entr�e r�serv�e aux seuls r�sidents ou leurs invit�s - prosp�rent dans le monde entier. Elles ne rel�vent plus d'une aberration urbaine ou de simples �ghettos pour riches�, mais incarnent l'aboutissement d'une �volution, peut-�tre inexorable, de la ville contemporaine o� la mixit� et l'h�t�rotopie deviennent l'exception. Observant Los Angeles - the Wonder City of America - l'ouvrage �claire les conditions d'apparition du ph�nom�ne : �talement, ins�curit�, s�gr�gation raciale ou sociale, h�g�monie du marketing, privatisation de l'espace public... Dans l'environnement incertain des m�gapoles o� tout est d�mesur�, sans qualit� et l'habitant un �tre nomade, le salut appara�t dans de petites communaut�s homog�nes, o� la r�miniscence du village se dispute avec le mod�le du parc � th�me. Parcs, campus, gated communities et autres enclaves priv�es, autarciques, structur�es en r�seau, forment l'alternative � la ville traditionnelle, Partout, le domaine commun, celui de l'espace civique partag� et libre, se voit remplacer par des territoires morcel�s, repli�s sur eux, �contr�l�s� : celui des gangs et des exclus ou celui des tenants du r�ve am�ricain. Prisonniers volontaires du r�ve am�ricain.

STEPHANE DEGOUTIN, graphiste et architecte d'int�rieur, s'est vite tourn� vers l'�tude des ph�nom�nes urbains et participe au r�seau international de recherche Private urban governance and gated communities. Il s�journe � Los Angeles gr�ce � une bourse du programme �L'envers des villes� initi� par la Caisse des d�p�ts et consignations et l'Association fran�aise d'action artistique, Il cr�e �galement des sites internet dont Nogoland.com, Lostincreteil.com ou Googlehouse.net.

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