A propos de cet article
ZOLA, Alexandrine (1839-1925) Lettre autographe signée « Alexandrine E. Zola » à Gabriel Thyébaut [Paris], 7 8bre [octobre] 1906, 8 pp. in-8° à l encre violette sur papier de deuil Long et bouleversant témoignage d Alexandrine Zola, veuve inconsolable après le décès de son époux Émile, son « cher ami », dont l âme imprègne plus que jamais les murs de leur ancienne maison de Médan « J ai été bien longue, mon cher ami, pour répondre à votre si bonne et si affectueuse lettre. Je ne m étais pas imaginée que déjà vous seriez reparti si vite, et je m en voulais de n avoir pu aller vous dire bonjour à la mairie […]. Et comme vous, je ne me plains pas de l été car il se prolonge d une superbe manière ; et j en suis satisfaite, quoi que n ayant pas eu le temps d en jouir beaucoup, car je ne puis m en aller en Italie, cette année, je laisserai beaucoup trop de choses émouvantes derrière moi. […]. Le pèlerinage du quatrième anniversaire a été merveilleux, nous avons eu du monde à ne pouvoir se remuer dans ce désolant jardin, qui ne reprend vie que pour quelques heures depuis la terrible catastrophe. Je suis navrée que l assistance n ait pas su encore organiser cette douloureuse maison, où je crois toujours mourir à chaque marche, lorsque je monte à ce cabinet de travail dans lequel la vie est partie aussi, et dont l inscription sur la hotte de la cheminée reste : « Nulla dies sine linea ». Hélas ! mon cher ami l a suivi jusqu au dernier jour ; et lorsque je vois le vide partout, je me sauve désolée de n avoir pu garder tout cela. Son atelier, le billard, notre chambre tout, tout enfin, qui est encore si plein de lui, et si vide en même temps. Et, cependant, si j avais gardé cette maison, après moi qui sait ce que serait devenu cette maison ? Je me reprends ainsi, en me disant que le destin l a vendu ainsi et que peut-être était-ce la seule façon de la conserver toujours à sa mémoire. Il faut trouver des raisons sans cesse, pour ne pas s en aller avant d attendre la fin naturelle. Mais qu est-ce que je fais de tant ouvrir ainsi mon c ur pour vous attrister plus que vous ne l êtes déjà ; excusez-moi cet instant de faiblesse, ce n est qu avec ceux que l on aime que ces choses arrivent. Merci de vos paroles si consolantes mais trop flatteuses pour le peu que je fais, je voudrais faire davantage si cela m était possible. J espère d après ce que m a dit M. Mesureur [directeur de l Assistance publique] que cette pauvre maison reprendra un peu d existence avec tous les petits être que l on allait y mettre. Les travaux commenceront en janvier prochain […] Je vous serre les mains Alexandrine E Zola » Émile Zola achète la célèbre maison en 1878 grâce aux gains de son roman L Assommoir. La demeure est agrandie à son idée avec la construction des tours Germinal et Nana. Bien que le couple s installe au 21b rue de Bruxelles à Paris en 1889, ils conservent la maison de Médan jusqu en 1902. Zola semble énormément apprécier l endroit et y écrit huit de ses romans dont Germinal, Nana, La Bête humaine et Au Bonheur des dames. C est également à cet endroit que se forme le mythique groupe de Médan, réunissant Émile Zola, Guy de Maupassant, Joris-Karl Huysmans, Henry Céard, Léon Hennique et Paul Alexis. Depuis 1903, soit un an après la mort de l écrivain, s y tient un pèlerinage en son honneur, ici évoqué par Alexandrine. En 1905, elle fait donation de la propriété à l Assistance publique en vue d y réaliser un établissement hospitalier de convalescence. Gabriel Thyébaut, intime du couple Zola : Thyébaut fait la connaissance du couple Zola dans le courant de l année 1881, l écrivain est alors en pleine rédaction de son roman Pot-Bouille. Thyébaut devient alors, selon les mots mêmes de Zola, « le grand jurisconsulte et conseil juridique des Rougon-Macquart » Devenu intime des Zola, il connait très bien la maison de Médan et y sera convié à d innombrables reprises pour des dîner en petit comité.
N° de réf. du vendeur ABE-1657883438551
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